Les parents paient, les enfants perdent

Lettre ouverte de Mélanie Laviolette, présidente de la FCPQ, parue dans l’édition du 27 septembre 2025 du Devoir. Pour lire l’article de Zacharie Goudreault paru dans la même édition du Devoir, cliquez ici.
Des dizaines de postes de techniciennes en éducation spécialisée coupés, des classes spécialisées déplacées dans d’autres écoles, moins d’aide à la classe, moins de tutorat, des postes de personnel professionnel, de soutien et de direction qui ne seront pas comblés.
Des activités parascolaires plus chères, des sorties éducatives annulées, moins d’élèves acceptés dans les programmes pédagogiques particuliers, des fonds pour améliorer la cour d’école sur la glace, des travaux de rénovation d’école retardés.
Le portrait que brossent les membres de la Fédération des comités de parents du Québec un mois après la rentrée scolaire est inquiétant. Dans plusieurs régions du Québec, dans des centres de services scolaires de petite et grande taille, les parents engagés rapportent que les services aux élèves sont affectés par des compressions budgétaires et que des frais sont ajoutés aux parents.
On pige dans les poches des parents pour garder les services éducatifs à flot.
Les parents, ceux qui peuvent se le permettre, ouvrent leur portefeuille pour consulter au privé si leur enfant ayant des besoins particuliers n’a plus de services à l’école.
Les parents ouvrent de nouveau leur portefeuille pour payer les frais qui s’ajoutent cette année pour les activités parascolaires et projets particuliers et qui augmentent pour le service de garde et le transport. En effet, l’argent n’existe plus dans les budgets pour rendre plus accessibles ces services qui ne sont pas considérés comme « éducatifs » au sens propre.
Peut-on encore dire aux familles qui doivent faire un choix entre la clinique privée ou une épicerie pour la semaine que l’éducation au Québec est gratuite?
On pige dans les réserves de motivation des parents engagés.
Saviez-vous qu’en ce moment, des élections ont lieu dans toutes les écoles publiques du Québec? Environ 18 000 parents sont élus pour siéger au conseil d’établissement de leur école, sans parler du comité de parents de leur centre de services scolaire, ainsi que de nombreux autres instances et comités. Le conseil d’établissement est un organe décisionnel primordial. C’est là que les décisions les plus proches des élèves sont prises, comme l’adoption du budget de l’école et du plan de lutte contre l’intimidation et la violence.
Pendant la dernière année scolaire, les demandes aux services-conseils de la FCPQ en lien avec des situations problématiques au conseil d’établissement ont augmenté de façon significative. Des situations d’ingérence et de non-respect du rôle et des responsabilités des membres des conseils d’établissement prévus par la Loi sur l’instruction publique (LIP) nous sont rapportées. Des mesures aussi simples que de déposer les documents sept jours avant une rencontre sont ignorées.
Depuis juin, de nombreux conseils d’établissement n’ont pas été sollicités pour prendre des décisions concernant la situation budgétaire difficile. Les membres parents d’un conseil d’établissement ont été mis en demeure après avoir refusé d’adopter le budget de leur école. Il y a des sièges vacants dans des conseils d’établissement, car les parents ne pensent pas qu’ils peuvent faire une différence en s’impliquant de cette façon. Pourtant, l’influence positive de l’implication parentale sur la réussite des élèves est documentée par la recherche.
Quel est le message qu’on envoie aux parents bénévoles quand on utilise des mesures légales contre eux, ou encore quand on ne les consulte pas sur des décisions importantes alors que leur rôle est prévu par la LIP?
Ce qu’on demande : du respect et du financement à la hauteur des besoins des élèves.
Je tiens à dire que ce n’est pas partout ainsi. Des écoles et centres de services scolaires ont trouvé le moyen d’épargner les services aux élèves. D’autres ont sollicité les instances décisionnelles où siègent les parents pour prendre des décisions parfois difficiles, mais concertées. Merci à ces milieux.
Mais quand ça va mal, ça va mal. Pourquoi? Parce que la LIP peut être ignorée en toute impunité. Il n’existe pas de mécanisme de recours en cas de non-respect de cette loi. La FCPQ demande un tel mécanisme depuis de nombreuses années.
Je dénonce les établissements qui écartent les parents bénévoles. Les parents engagés devraient être des atouts pour les dirigeants du réseau scolaire, des alliés qui connaissent la réalité des familles et dont la seule motivation est la réussite et le bien-être des élèves.
L’éducation devrait être financée à la hauteur des besoins des élèves. Les parents qui siègent sur des instances et qui participent de bonne foi, au meilleur de leurs connaissances et de leurs capacités, devraient être écoutés et respectés dans leur rôle.
Ce n’est pas la voie sur laquelle nous sommes engagés en ce moment, mais je crois qu’il n’est pas trop tard pour tracer ensemble une nouvelle voie. Laissez-nous la chance de faire partie de la solution. Travaillons ensemble, pour le bien de nos enfants.